on en parle d'autant plus en ce moment que le prix du pétrole est à la hausse.
De ce que je crois avoir compris, il y a un nombre considérable de paramètres qu'il faut prendre en compte.
Son pouvoir calorifique inférieur (PCI) est de 21200 kJ/l contre 31800 pour l'essence. L'essence est donc 1,5 fois plus calorifique que l'éthanol. L'E85 a donc un pouvoir calorifique de 22790 kJ/l (15%.31800+85%.21200). L'essence est donc 1,40 (RPCI) fois plus calorifique que l'E85.
Son rapport stoechiométrique (RS) est de 9 contre 14,6 pour l'essence. Celui de l'E85 est donc d'environ 9,8.
Le RS de l'essence est donc 1,48 (RRS) fois plus élevé que celui de l'E85.
Le RRS étant de 1,48, il "suffit" d'injecter 1,48 fois plus de carburant pour faire fonctionner une voiture essence à l'E85.
Le RPCI étant très proche du RRS, la puissance du moteur n'est pas trop modifiée. La puissance en E85 est même théoriquement légèrement supérieure d'environ 5% (RRS/RPCI-1) à quantité d'air égal.
Dans tous les cas, il faudra imaginer que la vaporisation d'un litre d'alcool est plus lente que celle de l'essence; on doit alors rajouter de l'avance à l'allumage, et pas qu'un peu: on parle de 6 à 8 degrés sur toute la courbe.
Sur un moteur injecté, il faut injecter environ 40% de carburant en plus. Pour cela, soit on joue sur le débit / la taille de l'injecteur, soit on va rallonger la durée d'injection. C'est d'ailleurs ce que font les boîtiers qui fleurissent partout en ce moment, qui "trichent" sur les valeurs transmises à l'ECM d'origine de la voiture, rallongent le temps d'injection et rajoutent de l'avance à l'allumage. C'est pour cela que les mélanges sur une voiture pas prévue pour ne fonctionnent pas: le calculateur est "hors limites" . Et aussi à cause du fait que le produit de la combustion qui est lu par la sonde lambda ne correspond pas aux valeurs nominales, et souvent, le calculateur se met en mode secours ou en mode "essaie de comprendre": ça marche, mais mal, ça démarre mal à chaud, souvent sans allumer le SES. Pour comprendre le fonctionnement, voir les excellentes vidéos (un peu longues, quand même😉) faites par @Eagle1_77
Sur un moteur à carbu, c'est différent: on ne peut rien faire croire à un carbu. Il fait son effet venturi en fonction de la dépression qu'il sent en dessous, et cette dépression ne varie pas avec le carburant utilisé, ou très peu.
Et donc, en théorie, il suffit de trouver un carbu spécifique éthanol, à mon avis, c'est même mieux d'en acheter un plutôt que de modifier l'existant. Les carbus spécifiques ont des joints qui vont bien, et parfois sont fait dans des matériaux faits pour.
Ensuite, et c'est là que ça commence, à partir des réglages oem, et du fait du RS moins favorable, augmenter la taille des gicleurs d'environ 40/45%, et normalement, roule Nènesse. Sans oublier que le poids spécifique de l'alcool (additivé à 15% de pétrole, au fait, d'où le E85 et pas E100) est différent de celui de l'essence. Il faudra donc sans doute penser à modifier le poids des flotteurs des cuves, ou sinon, on va avoir un problème d'alimentation. Et franchement, pour ceux qui ont des carbus à pointeaux, genre Q-jet ou AFB/Edelbrock, je ne sais pas quoi dire. Je ne sais pas à quoi ressemble un pointeau "plus gros".
Ensuite, se souvenir que le rapport de compression d'un moteur fait pour l'essence sera lui aussi moins favorable à l'E85. Ou plutôt, le taux d'octane du E85 est d'environ 100/105, et les propriétés "refroidissantes" de l'alcool la rapprochent plutôt des 110. Pour tirer avantage de cette propriété, il faudrait créer un moteur à taux de compression très élevé, d'environ 15:1, à rapprocher des environ 9:1 d'un moteur de tourisme à essence. D'une manière générale, les Américains qui courent en Top Alcohol font des moteurs dont le taux de compression statique est compris entre 15 et 17, qui monte à plus de 25 en dynamique lorsqu'on rajoute un compresseur. Certains dragsters alcool n'ont d'ailleurs même pas de système de refroidissement. C'est aussi pour cela que les puissances atteintes par les moteurs de compétition à l'alcool sont colossales, mais au prix d'une consommation de carburant très importante.
En bref: injection: OK, mais pour faire comme il faut, il faut une reprog ou un boîtier (et dans certains cas, un jeu d'injecteurs appropriés, parfois un jeu de bougies plus chaudes), carbu: faut voir, mais il y a du travail, et la réversibilité n'est pas immédiate. Le jour où on n'aura vraiment plus aucune solution, je me pencherai peut-être sur un small-block de 400 pouces, avec un CR de 14 ou 15, avec un carbu qui va bien ou une injection. Mais au stade d'aujourd'hui, je ne suis pas sur de l'intérêt. Ce dont je suis sur, c'est que les tentatives de mélange et d'un plein d'alcool pour un plein de 95, et ce genre de cuisine, sont plutôt du domaine de l'épicerie albanaise (et encore une fois, ça ne marche pas si ce n'est pas flex-fuel d'origine). Et que je préfère ne pas rouler plutôt que de faire des bornes avec une voiture qui tourne comme un galet niçois, et qui ne me donne plus de plaisir. Bien sur , ça ne vaut pas dire que beaucoup de gens ne sont pas en train d'essayer. Le garagiste en bas de chez moi a déjà des clients en panne à cause de ça. Comedabe: y'en a qui ont essayé, y z'ont eu des problèmes!